Une famille noire a disparu de sa maison en 1985 ; neuf ans plus tard, on les a retrouvés prisonniers d’une pièce secrète. En 1985, la famille Shaw a disparu de sa maison, laissant sa voiture garée dans l’allée. La police a conclu à un cas de négligence. Pendant neuf ans, la maison a gardé un terrible secret, si bien que personne n’a songé à regarder derrière les murs. Un jour, le nouveau propriétaire a entendu un bruit, un bruit qui semblait impossible.

La famille Shaw retrouvée vivante après neuf ans enfermée dans une pièce secrète de leur propre maison

Le 14 mars 1985, à Oak Park, une banlieue tranquille de Chicago, la famille Shaw – Reginald, 38 ans, infirmier ; sa femme Marlene, 35 ans, enseignante ; et leurs trois enfants, Latoya (12 ans), Darnell (10 ans) et la petite Keisha (5 ans) – s’est volatilisée sans laisser de trace.

La Chevrolet familiale était garée dans l’allée, le dîner encore tiède sur la table, la télévision allumée sur un dessin animé. Aucun mot, aucun signe de lutte.

La police, après trois semaines d’enquête, a classé l’affaire comme « départ volontaire » et insinué que le couple, endetté, avait peut-être fui avec les enfants. L’hypothèse a choqué le voisinage, mais personne n’a protesté longtemps. La maison a été vendue aux enchères en 1989.

Neuf ans plus tard, le 8 novembre 1994, tout a basculé.

Michael Dorsey, un jeune menuisier qui venait d’acheter la maison pour y vivre avec sa fiancée, effectuait des travaux dans la cave. Vers 22 heures, alors qu’il perçait un mur pour installer une prise électrique, il a entendu un bruit derrière la cloison : un grattement faible, régulier, presque humain.

Il a d’abord cru à des rongeurs. Puis il a entendu une voix, rauque, brisée, qui murmurait : « Please… water… »

En moins de dix minutes, Dorsey et deux voisins ont arraché le placoplacage. Derrière, une pièce de trois mètres sur quatre, sans fenêtre, sans ventilation, scellée depuis l’intérieur par des planches clouées à la hâte. À l’intérieur : cinq silhouettes squelettiques, allongées sur des matelas pourris. Les Shaw. Vivants.

Reginald, méconnaissable avec sa barbe jusqu’à la taille, a levé la main comme pour se protéger de la lumière. Marlene serrait contre elle Keisha, désormais âgée de 14 ans, qui tremblait violemment. Les enfants, devenus adolescents, avaient les yeux écarquillés, incapables de supporter la lumière des lampes-torches.

Tous étaient nus ou couverts de haillons, la peau couverte d’escarres. L’odeur était insoutenable.

Les premiers mots de Reginald, prononcés d’une voix rauque qu’on a dû lui faire répéter trois fois pour comprendre : « Il nous a dit qu’il reviendrait… Il n’est jamais revenu. »

« Il », c’était Earl Jefferson, le frère de Marlene, un ancien militaire renvoyé pour troubles psychiatriques.

En 1985, Jefferson, convaincu que la famille « allait être enlevée par le gouvernement » à cause de prétendues dettes imaginaires, avait drogué leur dîner avec des somnifères, puis les avait traînés un par un dans la cave.

Pendant que les Shaw étaient inconscients, il avait construit en une nuit la fausse cloison, utilisant des matériaux stockés dans le garage.

Il avait laissé une caisse de conserve, trois bidons d’eau de vingt litres, des couvertures et une lampe à pétrole, persuadé qu’il reviendrait « libérer » sa sœur et ses neveux « quand les agents seraient partis ».

Mais le lendemain matin, Earl Jefferson a été retrouvé mort dans sa voiture, garée à deux rues de là. Suicide par monoxyde de carbone. Personne n’a jamais su qu’il avait enfermé sa propre famille.

Pendant neuf ans, les Shaw ont survécu dans l’obscurité totale. Les conserves ont duré deux ans. Ensuite, ils ont bu l’eau de condensation sur les murs et mangé les cafards.

Reginald a raconté aux enquêteurs qu’ils avaient établi un calendrier en grattant la peinture : 3 287 traits sur le béton. Ils dormaient collés les uns aux autres pour se réchauffer. Marlene enseignait encore à voix basse les tables de multiplication à ses enfants.

Keisha, qui n’avait que cinq ans au moment de l’enfermement, a appris à lire grâce aux étiquettes des boîtes de conserve.

Quand les secours les ont sortis, ils pesaient à eux cinq moins de 180 kilos. Latoya, devenue une jeune femme de 21 ans, n’avait jamais vu le ciel depuis ses 12 ans. Darnell pleurait en boucle : « C’est vraiment le jour ? C’est vraiment le jour ? »

Les médecins de l’hôpital Rush ont parlé d’un « miracle médical ». Aucun d’eux n’avait développé de cancer malgré l’absence de soleil. Leurs os, bien que fragiles, n’étaient pas brisés. Leur vue s’est adaptée en quelques semaines.

Psychologiquement, c’est une autre histoire : Keisha a mis six mois avant de supporter le bruit d’une porte qui claque.

L’affaire a provoqué une onde de choc nationale. Le chef de la police d’Oak Park de 1985 a été suspendu. La ville a payé 12 millions de dollars de dommages et intérêts.

La maison a été rasée en 1997 ; à la place, on a construit un petit parc avec une plaque : « À la mémoire de neuf années volées, et à la force de ceux qui ont survécu. »

Aujourd’hui, trente ans plus tard, les Shaw vivent toujours. Reginald et Marlene, désormais septuagénaires, refusent les interviews mais assistent chaque année à la cérémonie du souvenir. Keisha est devenue infirmière. Darnell est pasteur. Latoya enseigne le piano aux enfants défavorisés.

Ils n’ont jamais reproché au monde de les avoir oubliés. Ils disent simplement, quand on leur demande comment ils ont tenu : « On s’avait qu’on était cinq. Tant qu’on était cinq, on était vivants. »

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